GLASS (P.)

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GLASS PHILIP (1937- )

Le compositeur américain Philip Glass naît le 31 janvier 1937 à Baltimore. Son père, disquaire et réparateur de radio, initie le jeune Philip à la musique en lui faisant écouter de nombreux disques. À l’âge de huit ans, il commence à étudier la flûte au Peabody Conservatory of Music de sa ville natale. De 1952 à 1956, il suit des cours de philosophie, de piano et de mathématiques à l’université de Chicago. Élève de la classe de composition de William Bergsma et de Vincent Persichetti à la Juilliard School of Music de New York, il en sort diplômé en 1961; il travaille également avec Darius Milhaud et, en France, avec la célèbre pédagogue Nadia Boulanger, de 1963 à 1965. Dès cette époque, Glass compose. Ses premières pièces sont largement méconnues; on signalera un Quatuor , un Essay for orchestra , un Sextet pour cuivres , une Sérénade pour flûte ... La liste en est impossible à dresser car le compositeur a renié toutes les partitions composées avant 1965 et il refuse même qu’on les joue ou qu’on les enregistre: Glass n’a par exemple jamais autorisé ses amis du quatuor Kronos à enregistrer son premier Quatuor ; ceux-ci devront se contenter, en 1993, d’enregistrer l’intégrale de sa production en commençant par le deuxième.

Les années suivantes sont capitales pour l’élaboration de son esthétique et pour son évolution tout simplement humaine. En 1965, il rencontre à Paris le célèbre compositeur et joueur virtuose de sitar indien Ravi Shankar. Celui-ci le fait travailler sur une partition qu’il doit éditer pour le film Chappaqua ; il s’agit d’un travail de notation et de complément musical. À la demande de Shankar, Glass intègre dans la partition des passages de son propre cru. Ce travail lui donnera par la suite l’occasion d’étudier la musique indienne avec ce maître.

Vient l’époque des voyages: en Inde, en Afrique, en Asie centrale; il s’agit en quelque sorte du complément pratique, en prise directe avec d’autres cultures, des études occidentales. Afin de jouer et de faire connaître sa musique, il forme son ensemble instrumental, le Philip Glass Ensemble, qui voit le jour en 1968; il met à son répertoire des pièces hypnotiques, répétitives, austères, écrites dans un langage tonal: Music in Contrary Motion (1969), Music in Fifths (1969), Music With Changing Parts (1970) et, le chef-d’œuvre, Music in Twelve Parts (1974), composition fleuve d’une durée supérieure à trois heures. Sa technique d’écriture, librement inspirée par la musique indienne, procède par additions de motifs harmoniques répétés. Ses œuvres sont interprétées sur des instruments amplifiés (flûtes, saxophones, orgue électronique, synthétiseur, voix), la console de mixage étant traitée comme un instrument à part entière; les musiciens sont assis à même le sol. Michael Riesman, aux claviers et à la direction, ainsi que l’ingénieur du son Kurt Munkacsi vont demeurer ses collaborateurs fidèles. Glass commence à être de plus en plus connu; de nombreux concerts, des pièces écrites pour la compagnie de théâtre expérimental Mabou Mines rencontrent un public varié et enthousiaste. En 1976, l’opéra Einstein on the Beach , fruit d’une collaboration avec le metteur en scène Bob Wilson, est créé au festival d’Avignon le 25 juillet avant de faire le tour du monde, avec deux représentations en novembre au Metropolitan Opera de New York. il s’agit d’une nouvelle conception de l’opéra, bousculant la narration traditionnelle, illustrant une succession de tableaux par un déferlement de musique extatique. Glass travaillant souvent par cycles de trois œuvres, cet opéra sera suivi de deux autres «portraits». Si Einstein on the Beach symbolise la science, l’opéra Satyagraha (1980) illustre le rôle politique de Ghandi et le troisième, Akhnaten (1983), la religion. Le compositeur collabore, entre autres, avec les chorégraphes Twyla Tharp et Lucinda Childs: les partitions Dances (1979) et In the Upper Room (1986) sont représentatives des facultés visuelles et novatrices de sa musique. Peu à peu, son écriture se fluidifie, et, se tournant vers les formations traditionnelles, Glass ne ressent plus le besoin de provoquer. Ses œuvres symphoniques mélangent allègrement ses techniques fondées sur la répétition, son lyrisme, son goût pour la mélodie, son sens des couleurs. En 1987, une commande de l’orchestre de Cleveland lui permet d’écrire The Light ; une autre œuvre pour orchestre, The Canyon (1988), le confirme dans la tradition symphonique américaine; enfin, Itaïpu (1989), pour chœur et orchestre, dénonce, en citant les textes sacrés de la tribu indienne des Guarani, le choc entre la technologie et la nature. Le Concerto pour violon (1987) met en œuvre des matériaux tirés de l’opéra Einstein , et emporte l’auditeur vers un ailleurs grâce à une série d’harmonies, de rythmes, de mélodies tourbillonnantes à l’infini. Parmi ses nombreuses musiques de film, citons la collaboration fructueuse avec le cinéaste Godfrey Reggio (Powaqqatsi , Koyaanisqatsi et Anima Mundi ), puis The Thin Blue Line pour le documentaire de Errol Morris, le magnifique Mishima , A Brief History of Time et, en 1997, The Secret Agent pour le film de Christopher Hampton tiré de l’œuvre de Joseph Conrad. Glass est également directeur du label discographique Point Music Records, qui a pour vocation de faire connaître à un vaste public de nouveaux compositeurs, d’une maison de production, d’une société d’édition musicale et d’un studio d’enregistrement, le Looking Glass Studio. Avec des thèmes tirés d’albums de David Bowie et Brian Eno, il a déjà signé une Low Symphony et une Herroes Symphony . En 1992, son opéra The Voyage , une commande du Metropolitan Opera, est présenté à l’occasion du cinq centième anniversaire de l’arrivée de Christophe Colomb en Amérique. Une nouvelle trilogie (1992-1996) est fondée sur l’œuvre de Jean Cocteau; elle «transforme» le film La Belle et la Bête en opéra-cinéma (la bande-son du film ayant été complètement éliminée, l’opéra, composé avec le dialogue original, est joué pendant que l’on projette le film; les voix sont synchronisées avec le mouvement de lèvres des acteurs pour un effet des plus saisissants), le scénario des Enfants terribles en spectacle de théâtre et de danse tandis que le scénario d’Orphée sert de base pour le livret d’un opéra de chambre.

Glass, qui se définit comme un compositeur de théâtre, voit souvent sa volumineuse discographie utilisée par des illustrateurs sonores pour la publicité, des documentaires, des émissions, des reportages... Ainsi, tout auditeur de radio ou tout téléspectateur a entendu, souvent sans le savoir, la musique de Philip Glass.

Encyclopédie Universelle. 2012.

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